La version sénatoriale de la proposition de loi portée par la députée Stéphanie Rist a notamment introduit le principe de l’élection des présidents des commissions de soins infirmiers, de rééducation et médicotechniques (CSIRMT). Les Conférences nationales des directeurs généraux de CHU et des directeurs de centres hospitaliers expriment leur opposition et leur très vive inquiétude quant à cette évolution.
Aujourd’hui présidées par les coordonnateurs généraux des soins (CGS), ces commissions se concentrent sur le projet de soins et le volet soignant de la politique d’amélioration de la qualité. En confiant la présidence de cette instance au CGC, directeur des soins, le législateur a souhaité confier à la CSMIRT un rôle d’expertise, d’analyse et d’observation des pratiques soignantes. Si un système électif devait être retenu pour le président de la CSMIRT, cela changerait nécessairement la nature de l’instance en fondant sa légitimité non plus sur l’expertise mais sur la représentativité, empiétant dès lors sur le rôle du comité technique d’établissement (CTE) / comité social d’établissement (CSE). Ce mélange des genres est d’autant plus à risque que la proposition de loi tend à renforcer les compétences de la CSMIRT, objectif qui demeure sur le principe une bonne chose, uniquement si le statut de son président demeure inchangé.
Nos Conférences rappellent que la représentation des personnels non médicaux est déjà assurée par le CTE qui se trouverait d’emblée affaibli voire concurrencé dans certaines configurations par la CSIRMT, si cette évolution devait être retenue par la commission mixte paritaire prévue la semaine prochaine. Au moment où le dialogue social doit demeurer une préoccupation majeure, tous les personnels étant toujours pleinement mobilisés par la crise épidémique, il ne parait pas opportun d’affaiblir l’instance de représentation de l’ensemble des personnels hospitaliers. Au contraire, le CTE doit être identifié comme la seule instance qui permet un dialogue nourri, dans un cadre clairement défini, sur l’ensemble des sujets qui concernent les établissements et leurs personnels, y compris ceux qui ont pu faire l’objet d’un examen en Directoire.
La CSMIRT doit demeurer une instance, échappant le plus possible (les membres sont élus et peuvent incarner personnellement une tendance syndicale) aux enjeux de la représentation politique et syndicale, qui permette d’associer les acteurs du soin à la politique générale de l’établissement, à la préparation du projet de soin et au suivi de sa mise en œuvre. A la légitimité élective du président de la CME, doit répondre la légitimité fondée sur l’expertise et la compétence du CGS, dont l’intégration dans les équipes de direction est fondée sur ces bases tout comme la présidence de la CSMIRT.
Dans le cas contraire c’est l’attractivité des métiers de coordonnateur général des soins et de directeur des soins qui s’en trouveraient menacés, ce qui est paradoxal alors que d’autres volets des amendements portés par le Sénat au projet de loi, ont veillé à valoriser la place du projet de soin au sein du projet d’établissement et ce faisant la place de toute la filière des métiers du soin infirmier, de rééducation et médicotechniques dans le fonctionnement de l’hôpital.
Pour rappel, la question de la gouvernance vient de faire l’objet d’une large concertation ayant abouti, de façon consensuelle, à un projet d’ordonnance, en cours d’examen au Conseil d’Etat. Il est à noter que la demande de l’élection des présidents de CSIRMT n’y a jamais été exprimée. Les deux conférences hospitalières estiment donc qu’il ne saurait être question de s’engager dans cette voie dont on voit clairement les risques en matière de gouvernance et dont on mesure difficilement les bénéfices.
Marie-Noëlle Gérain-Breuzard
Présidente de la conférence nationale des DG de CHU
Francis Saint-Hubert
Président de la Conférence nationale des directeurs de centres hospitaliers